"- Alors, t'es prête ? Apparemment, il y a eu l'admission d'un grand brûlé dans l'après-midi, ça va être intense cette nuit !"
Blanche enfila sa blouse et ses chaussures de travail, et se retourna vers son interlocuteur.
- Oh, salut Joe ! Comment vas-tu ?"
Elle attrapa son téléphone de travail et se retourna vers Joe. Blanche fut prise de stupeur en découvrant le visage gris et terni de son ami.
"- Il n'a pas du dormir depuis au moins trois nuits, quel enfer ..." Songea t-elle.
Mince et long, le dos de Joe semblait s'être courbé comme s'il portait sur sa colonne vertébrale le poids de ses nouvelles responsabilités .Il était rentré en sixième année de médecine depuis peu et avait donc le privilège, ou le malheur, Blanche n'aurait su le dire, de pouvoir assurer des gardes de nuit à l'hôpital en tant qu'interne.
Comme pour appuyer ses pensées, Joe bailla intensément et lui lança:
"- C'est ma quatrième garde de nuit de la semaine, je commence à voir trouble et a ne plus avoir les idées claires !" Il ria.
"- J'irais dormir sous les coups de minuit, sinon, c'est moi qu'on va devoir hospitaliser dès demain matin !" Compléta t-il.
Sans attendre la réponse de Blanche, il attrapa sa tasse de café - sûrement la vingtième de la journée- et sortit du vestiaire.
Blanche déposa son sac, refit sa queue de cheval et fila dans la salle où figurait les emplois du temps. Elle pria, tout en marchant dans les couloirs de l'hôpital, pour ne pas se retrouver dans le secteur de soins palliatifs. Elle avait eu une journée éprouvante, et espérait avoir cette fois-ci une nuit tranquille et paisible.
Sur place, dans la salle, elle retrouva deux de ses collègues, Samantha et Julie.
"- Nuit paisible qui s'annonce pour vous ce soir ?" Lança Blanche, les yeux malicieux.
Elle connaissait déjà la réponse de ses amies, au regard de chien battu qu'elles lui lançaient.
"- On est en soin palliatif, avec les médecins", Grommela Julie, faisant la moue.
"- Vous avez pu voir où j'étais?"
"- Gériatrie." Lui répondit Julie.
Blanche poussa un soupir de soulagement. La gériatrie, c'était le service le plus calme. Mise à part l'angoisse des personnes âgées et les appels intempestifs de leur part en plein milieu de la nuit, rien de grave ne s'y produisait.
"- Je suis seule dans le secteur ?" Demanda t-elle.
Julie fronça les sourcils, prise dans un effort de mémoire intense.
"- Normalement oui, en tout cas aucun nom appart le tien y figurait. En gériatrie, on est souvent seules, c'est si calme là bas, t'as quasi rien à faire !"
Blanche acquiesça d'un signe de tête et salua ses collègues, leur souhaitant bon courage.
Elle connaissait le protocole par cœur. D'abord, il fallait effectuer les soins d'hygiène avant le coucher des personnes. Cela devait être plutôt simple, depuis sa première année, elle en avait bouffé par centaines.
Ensuite, il fallait s'assurer que les patients prenaient leur traitement. Ça aussi, un jeu d'enfant, mise à part quand un patient s'obstinait à les prendre. Dans ce cas là, il faudrait qu'elle se change en négociatrice experte.
Elle visualisa les actes qu'elle devait accomplir et se vit les réaliser, anticipant tout problèmes qui pourrait se mettre en travers de son chemin.
Elle attrapa son chariot et fit l'inventaire de celui-ci.181Please respect copyright.PENANA7Dtlok5OdJ
Il valait mieux le faire plutôt que de se retrouver en plein milieu d'une toilette et se rendre compte que la boîte de gants n'était plus ! Elle en avait fait les frais bien trop souvent à son goût, et espérait ne plus s'y faire prendre dorénavant.
Boîte de gants, OK.181Please respect copyright.PENANAuTa6uFb6Yu
Serviettes, OK.181Please respect copyright.PENANAyAdhZ8aTdA
Gants de toilettes jetables, OK.181Please respect copyright.PENANAWvn5EvKOZ8
Gel désinfectant, OK.
Tout avait l'air en place et elle décida de se mettre en route vers la première chambre.
C'était celle d'une petite mamie qu'elle connaissait plutôt bien maintenant. Elle était rentrée deux semaines auparavant, victime d'un virulent AVC et avait perdu depuis, toute sensibilité sur la partie gauche de son corps.
"- Bonjour Madame Boumond, comment allez vous ?"
Blanche s'efforça de prendre sa voix la plus joviale, un tantinet hypocrite. Un talent qu'elle avait appris à développer au cours de sa formation. Le faire semblant. Oublier ses problèmes personnels et la fatigue qui l'etouffait.
La vieille dame maugréa un faible "Oui" et se mit directement à se plaindre de ses douleurs aux jambes.
Blanche se mit au travail.181Please respect copyright.PENANAbEKaR6MoVJ
Dix minutes plus tard, la vieille dame était mise en tenue de nuit et changée, prête à dormir.181Please respect copyright.PENANAFFxbnhmlxl
Blanche la salua et sortit de sa chambre.181Please respect copyright.PENANA1eoeRBgUBM
Encore 3 personnes.181Please respect copyright.PENANA6kjbfjI0Pm
Elle soupira, déjà épuisée par l'effort qu'elle venait de fournir.
Prochaine destination.181Please respect copyright.PENANA3eslIEwqBh
Chambre 134181Please respect copyright.PENANAjrl2uQcEl8
La jeune fille reprit son chariot et se mit directement en route, d'un pas léger et précipité. Plus vite ce serait fait, plus vite elle pourrait boire son café dans la salle commune.
Elle n'était qu'à quelques mètres de la chambre quand son téléphone de service se mit à sonner bruyamment.
Elle reconnut instantanément la sonnerie. Un patient venait de tirer la sonnette d'alarme, appellant à l'aide une infirmière.
Elle jeta un coup d'œil rapide à la notification qui venait d'apparaître sur l'écran.
Chambre 127.
Blanche fronça les sourcils un instant.181Please respect copyright.PENANAWDui7Jnmzw
Elle connaissait le secteur de gériatrie par cœur et elle n'avait jamais eu aucun patients dans la chambre 127.181Please respect copyright.PENANAEItgwCFfWx
Un nouvel arrivant ?
Blanche fut prise soudain d'un mal de tête intense. Elle etouffa un cri et se pencha sur son chariot, le dos courbé.181Please respect copyright.PENANAA5K8BoBnDU
Aussi vite que le mal s'était installé, il repartit. Elle était prise d'un malaise indescriptible et soudain, les couloirs vides et blancs de l'hôpital la firent frémir.
Elle posa son chariot dans un coin du couloir, entraînant un cliquetis métallique, brisant le silence de cet hôpital qui soudain lui semblait lugubre.181Please respect copyright.PENANABx0OgN5RGx
La jeune infirmière pris une grande inspiration et rebroussa chemin, prête à venir en aide.
Chambre 129181Please respect copyright.PENANAHDKxlZbCz7
Chambre 128181Please respect copyright.PENANAPvn1R0sbC2
Chambre 127.
C'était ici.
Blanche toqua et sentit le contact glacé de son doigt contre le bois de la porte.181Please respect copyright.PENANAe4i4p8JdU3
Sans attendre de réponse, elle poussa la porte et se retrouva plongé dans le noir le plus total.
Un malaise intense l'envahi, l'air était étouffant et son mal de tête repris de plus belle.181Please respect copyright.PENANAGoE0WWHdxt
À tâtons, elle trouva l'interrupteur et alluma la lumière.181Please respect copyright.PENANALhUsOy72vS
Dans un cliquetis mécanique et fragile, les lumières au plafond de la chambre se mirent à clignoter à plusieurs reprises avant de s'allumer définitivement.
La lumière vint frapper Blanche de plus belle, comme un flash lumineux, l'aveuglant pendant plusieurs secondes. Elle aperçu la silhouette d'un homme dans le lit médicalisé. Il lui fut impossible d'identifier son visage.
Elle ressentit comme l'effet d'une décharge électrique sur son visage et elle fut contrainte de reculer, se retrouvant le dos plaqué contre le mur froid de la chambre 127. Elle regarda une dernière fois les lumières au plafond avant de sombrer.
Flash bleu.181Please respect copyright.PENANAICSa8kOw1d
Flash rouge.181Please respect copyright.PENANArmZaD7R4ud
Une odeur métallique vint lui chatouiller les narines. Tout dansait autour d'elle, tout était flou. Plus de temps, plus d'instant, juste du flou. Rien de plus. Rien de moins.
"- Appelez une équipe sur l'autoroute A10 à proximité de la sortie 114 direction Lyon. Deux personnes blessées. Nous les prenons en charge."
C'était un homme qui parlait. Sa voix semblait déviée par le vent qui soufflait et le froid glacial qui venait engourdir son corps.
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